Depuis
une quinzaine d’années, l’attractivité
touristique du Mont Hombori, s’est accentuée
en parallèle au développement spectaculaire
de la destination Mali. Le site occupe aujourd’hui
une place enviable sur la carte des flux touristiques
de cette région d’Afrique de l’Ouest,
du fait de sa proximité aux trois grands pôles
de développement touristique nationaux que sont
le Pays Dogon, Tombouctou et Djenné. L’axe
goudronné qui relie le Mont à Gao, où
atterrissent un nombre croissant de charters, renforce
encore le potentiel touristique de la région.
Outre des qualités écologiques exceptionnelles
qui en font un haut lieu de la biodiversité mondiale
en cours de monitoring, le site présente une
richesse architecturale tout à fait remarquable
puisque les habitats dogon, peul et songhay qui s’y
manifestent sont perchés dans les éboulis
et les ressauts rocheux. Le Mont représente alors
un refuge sous le double plan biologique et culturel,
aujourd’hui soumis à l’épreuve
du tourisme.
La fréquentation croissante du Mont Hombori
constitue un objet controversé : faut-il se réjouir
du nombre de touristes qui cherchent à mieux
connaître cette destination ou convient-il au
contraire de s’inquiéter des répercussions
que leurs activités peuvent entraîner ?
Le tourisme se développe-t-il en marge des autres
activités sociales ou représente-t-il
une action perturbatrice des usages qu’il convient
d’encadrer ? Fondamentalement, deux options se
dégagent de l’analyse de mise en tourisme
de Hombori. La première approche consiste en
une mise en défens totale qui préserverait
intégralement la richesse écologique sommitale
à des fins scientifiques et patrimoniales et
qui constituerait une approche orientée sur la
préservation d’un patrimoine naturel. Plusieurs
obstacles importants s’opposent pourtant à
cette option, qui apparaît alors comme une orientation
difficilement envisageable dans les conditions actuelles.
Tout d’abord, il est nécessaire de tenir
compte du fait que le sommet est accessible depuis 1959
aux alpinistes et, de ce fait, constitue aujourd’hui
un spot reconnu à l’échelle internationale.
En outre, l’interdiction d’accès
priverait la région de ressources financières
potentiellement appréciables pour le développement
économique de la région. Enfin, les moyens
actuels à disposition de l’Etat malien
ne lui permettraient pas de faire respecter une interdiction
générale d’accès aux parties
sommitales, ce qui ouvrirait la porte à des pratiques
illégales, dommageables en termes d’image
de la destination. La seconde approche considère
essentiellement le tourisme sous l’angle des potentialités
d’un développement « intégré
», c’est-à-dire qu’elle s’autorise
à penser l’ouverture du site aux pratiques
actuelles d’escalade et de trekking, sous réserve
d’aménagements. Le risque que cette démarche
peut faire courir au milieu naturel ne doit pas être
sous-estimé. L’augmentation de la fréquentation
touristique est en effet susceptible d’accélérer
la dégradation de la richesse naturelle du Mont,
même si elle constitue une opportunité
d’action en faveur des populations qui vivent
dans les sites perchés et qui sont les dépositaires
de la richesse culturelle des lieux.
C’est pourquoi il devient nécessaire d’imaginer
que les options précédemment décrites
ne sont pas nécessairement irréconciliables.
Il est en effet possible d’imaginer que la conservation
du site soit basée sur le principe d’un
cercle vertueux dans lequel la protection légale
offerte au Mont renforce son attractivité touristique.
Sur ce point, il est sans doute possible de s’inspirer
partiellement des initiatives du Pays Dogon classé
au Patrimoine de l’Humanité de l’UNESCO,
pour envisager des actions permettant d’améliorer
les conditions de vie des populations locales, aujourd’hui
confrontées à de graves déficits
sanitaires et socio-éducatifs. Cette approche
permettrait la valorisation globale du patrimoine naturel
et culturel. Si on admet de ce qui précède
qu’un accès aménagé et concerté
est l’hypothèse la plus réaliste
et la plus profitable au développement humain
de la région, se pose alors la question de la
direction la plus appropriée à suivre.
Quels sont les aménagements qui peuvent générer
des ressources durables pour les acteurs du tourisme
et les plus judicieux en termes écologiques,
c’est-à-dire ceux qui préservent
l’unicité et la qualité des richesses
naturelles du site ? L’hypothèse de ce
travail est de privilégier une démarche
qui concilie aspects environnementaux et sociaux. Dans
la mesure des inégalités déjà
existantes dans l’espace comme dans la société,
le but à atteindre est de faire en sorte que
les gains obtenus par une éventuelle ouverture
du site au tourisme puissent être négociés
entre toutes les parties et le plus équitablement
possible.
Cette orientation nécessite en outre de considérer
que le Mont Hombori ne peut être appréhendé
que dans le contexte régional du Gourma des Monts,
c’est-à-dire qu’il serait contre-productif
que la réflexion sur la sauvegarde du Mont se
développe indépendamment de sa situation
à l’intérieur des circuits touristes
locaux, régionaux et nationaux. L’approche
touristique ne peut être restreinte à l’étude
de la partie sommitale étant donné le
nombre restreint de visiteurs qui la fréquente
annuellement, évalué à une cinquantaine
environ, en proportion de ceux qui sont attirés
par le Mali en général. En d’autres
termes, l’étude sur Hombori doit s’inscrire
dans le cadre d’une réflexion sur la destination
du même nom, qui conjugue patrimoine naturel et
culturel et s’étend sportivement, culturellement
et scientifiquement aux aspects sommitaux et aux parties
basses.
En savoir plus: Le développement du tourisme
dans les Monts Hombori (Mali) [pdf]
Pour plus d’informations, contactez : owalther@hombori.org
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